Portrait


L'atelier d'architecture TJAW a été fondé en 1997 en formulant l'hypothèse que les notions de qualité architecturale et d'efficacité fonctionnelle et économique sont conciliables. Notre architecture est motivée par la recherche de la qualité fonctionnelle, formelle et spatiale avec la conviction que l'environnement construit influence directement le contenu et la qualité de nos vies, que ce soit sur le lieu de travail, à domicile ou dans les espaces publics intermédiaires. Un environnement construit de qualité contribuerait donc à notre bien-être et par conséquent à notre productivité.

Les domaines de compétence de L'atelier TJAW sont le développement, la planification et la réalisation dans les disciplines de l'aménagement du territoire, de l'urbanisme et de l'architecture, dans le secteur de l'architecture d'intérieur, du design de produit et d'entreprise et du design durable, de la direction de projet et de l'expertise et du conseil au maître de l'ouvrage. Le conseil au maître de l'ouvrage, privé ou institutionnel, constitue la prestation de conseil stratégique par laquelle une relation de confiance commence entre l'architecte et son client.

Notre expérience nous permet de proposer des solutions durables et économiquement intéressantes, répondant au exigences du client. Nous sommes actifs dans le domaine du logement, des infrastructures de service et de l'industrie.


Maison Minergie Faraday
Architecture: TJAW + J-Z Architekten / Photographe: Joël Tettamanti

Quelques chèvres se dirigent vers une bergerie, à flan de côteau. Une petite demeure les accueille, inscrite dans le paysage hétéroclite de ce quartier de proche périphérie urbaine, plus tout à fait campagne, pas encore tout à fait ville. La maison de la Jurastrasse s’y dresse, fièrement, ancrée, plantée, plus qu’accrochée à ce terrain fuyant, s’échappant peu à peu vers l’eau vive, omniprésente des bords de l’Aare.

Affirmer aujourd’hui, une théorie architecturale pérenne, défendre des principes, des vertus immuables s’avère difficile, contradictoire au temps vécu, à la vitesse de perception que l’on en a, et invite davantage à privilégier une fragmentation progressive de la pensée. Cette fragmentation, que symbolise l’instantané photographique, la répétition et la multiplicité des images, l’addition des référents formels, se traduit en une expression habillée, presque déguisée, de l’instable, d’un mouvement latent.

Les façades sont devenues des interfaces, des peaux sensibles, absorbantes, perméables, ou protectrices, un goût prononcé pour les textures, pour les matières inusitées s’est fait (à nouveau) jour et, l’architecture qu’elles révèlent, se mue en vecteur médiatique. Ici, le jeu est double. Indéniablement le contexte s’imprime, corrode. Au mimétisme s’opppose la carapace, la cage, une architecture réactive, un épiderme caméléon, analogique, imbibé des caractères magnétiques d’une ligne à haute tension dont la proximité renforce la représentation paradoxale du décor.

Conçue pour offrir un mode d’habiter « alternatif », en autorisant, sans modularité particulière, le potentiel de combiner une forme d’habitat communautaire et la claire division de deux logements indépendants, la maison Faraday déploie un grand corps bâti, déplié dans une section »origamique ». Le mode distributif, dédoublé, est simple, et confirme l’ascension vers une lumière captée, au sommet, par deux hauts-jour verticaux, surdimensionnés, à la fois écrans et projecteurs, vases d’expansion à l’infini de l’espace intérieur.

« Lorsque rien n’arrête notre regard, notre regard porte très loin. Mais s’il ne rencontre rien, il ne voit rien ; il ne voit que ce qu’il rencontre : l’espace, c’est ce qui arrête le regard, ce sur quoi le regard butte . »(1)

Les deux « prises de vue », proposent en permanence, par la singularité de leur format, des images subjectives de la réalité observée. La reproduction des effets de la lumière en trois dimensions, le « Ray-Tracing », dépasse le jeu du cadrage et impose l’image à la vue, transformant alors la contemplation du paysage en séquence photographique.

Cette double-fenêtre ou le double apport identique de ces deux ouvertures, dans des plans différents, celui de la toiture et celui de la façade, confèrent à la maison une complexité. Les surfaces continues sont confirmées, toit et façade ne font qu’un, les revêtements intérieurs ne se distinguent que par le pli, le toit est admis dans l’espace habitable, le sous-toiture a disparu. La forme externe n’est plus un corps sous un chapeau mais un volume déformé. Tout projet de maison peut porter à l’expérimentation, à la spéculation intellectuelle et technique. Le programme compact, aisemment contrôlable permet de définir la construction dans une notion plus proche de celle de l’objet que du bâtiment.

Les plans de la maison Faraday, dont l’expression dessinée emprunte son vocabulaire aux pièces mécaniques, évoquent un jeu de continuité périmétrale sans début ni fin évidente, reprenant les rayons de courbure nécessaires à l’exécution des panneaux de couverture de cuivre. Les assemblages formels, volumétriques, du balcon ou de l’escalier extérieur, adoptent le langage du mobilier, pour appartenir à un dedans-dehors volontairement flou, et, leur expression reproductible se retrouve dans les composantes satellites des aménagements hospitaliers d’un jardin escarpé.

Les espaces sont fluides, la forme typologique, qui, par le regroupement latéral, au nord, des espaces distributifs et sanitaires, libère, à chaque niveau, un plateau situé dans la meilleure exposition, et indique que rien n’est tout à fait figé, ni dans la composition spatiale, ni dans le mode diviseur choisis.

Si la façade de cuivre, ondulante, exaspère et concentre les vibrations atones de l’environnement immédiat, l’intérieur adopte la neutralité d’une page blanche, qui peut, à tout instant se consteller d’images, de reflets, d’intermittences. L’instabilité est alors maîtrisée, dans une forme expressive contrastée, proche de l’Arte povera, qui décline les objets usuels du construit en autant d’attentions « confortables », pour lesquelles les matériaux employés feignent de démontrer une définition spartiate.

Polycarbonates, verres colorés, simplement siliconés, panneaux de bois reconstitués, béton brut apparent, utilisés pour ce qu’ils sont, dans leur véritable nature, composent les différents éléments nécessaires aux usages courants. Les parcours sont ponctués par la couleur, une couleur qui n’existe que par la lumière, naturelle ou artificielle, en autant de filtres luminescents ou réfléchissants.

Toit et façade se confondent dans une monomatière. Une mise en œuvre du cuivre, qui tire sa référence des plaques de tôles ondulées réservées autrefois aux constructions provisoires ou aux abris de fortune, conférant à l’objet ainsi construit une forme de reconnaissance immédiate, un habit remarquable, spécifique qui échappe à l’ornement. Détourné dans une approche sensible de la matière, le cuivre n’est pas neutralisé, son exposition constante le ternit, il devient, peu à peu, plus brun, demain, peut-être sera-t-il noir, plus énigmatique encore.

A l’instar du Stellwerk de Herzog & de Meuron à Bâle, sa capacité absorbante est évolutive, l’objet est incertain, la maison Faraday va progressivement quitter son univers insolite, parce que « l’architecture s’efface pour devenir toujours plus matérielle, toujours moins virtuelle, et offrir des images que l’on comprenne de manière formelle et sensuelle» dit Jacques Herzog.

(1), G.Perec, Espèce d’espaces

Philippe F. Meyer Ray-Tracing FACES 62 Printemps 2006 Materia povera